*Pourvu que je ne tombe pas encore sur un obsédé du protocole...*
Telles furent les pensées d'Amélie lorsqu'elle reçut sa nouvelle affectation. En effet, revenant de sa mission dans les bas quartiers de Central, elle apprit la mort de son actuel supérieur. Fait étonnant en soit, le vieux Général à qui elle servait d'homme de main (Amélie n'aimait vraiment pas ce terme, étant une femme) ne quittait jamais son bureau. Elle le soupçonnait même d'y dormir, pour avoir souvent espionné son supérieur afin de découvrir s'il lui arrivait de quitter son lieu de travail pou rentrer à un quelconque domicile, sans résultat. Elle en était donc venue à penser que l'homme ne possédait pas de domicile, et s'était amusée à faire des suppositions selon lesquelles il serait en fait une chimère créée par l'armée pour travailler jour et nuit. Un petit délire personnel évidemment. Enfin, apparemment il avait été terrassé par une crise cardiaque, et franchement Amélie s'en moquait quelque peu. Elle n'avait jamais aimé cet homme, qui adorait par dessus tout la rabaisser, elle qui n'était jamais "que" Major, alors que lui, le grand Général de Brigade héros de la guerre et blablabla... Selon le vieil homme, elle aurait du se sentir honorée de le servir, parce que cela enrichissait le peu d'expérience que la jeune femme avait de l'armée, et d'autres conneries qu'Amélie n'écoutait pratiquement jamais.
Ce qu'elle aimait, elle, c'était nouer des liens avec les gens qu'elle cotoyait, pouvoir appeler ses connaissances par leur prénom lorsque c'était possible, et passer de bons moments en leur compagnie. C'est pourquoi elle n'obligeait jamais un soldat de rang inférieur à la saluer lorsqu'ils ne se trouvaient pas en public, et ne bronchait pas quand on l'appelait par son prénom. D'ailleurs elle préferait largement déjeuner en compagnie de soldats, l'ambiance était beaucoup plus décontractée qu'en compagnie d'officiers, généralement dotés d'un ego surdimentionné, faisant étalage de leur Alchimie s'ils en avaient une, ou de leurs expérience militaire. Quel ennui! Non, la jeune femme préferait de loin les blagues grivoises des soldats, les éclats de rire sans que l'on sache par quoi ils étaient provoqués, et les avances douteuses qu'elle refusait cependant toujours poliment. Pour elle, c'était ça l'armée: la camaraderie, la complicité, et lorsqu'il le fallait, le rétablissement de l'ordre.
C'était d'ailleurs l'objet de sa précédente mission, rétablir l'ordre. Cet assassin d'enfants avait été... Monstrueux, c'était le mot. Il méritait largement d'aller en prison, et Amélie esperait qu'il se ferait battre par les autres prisonniers, ça lui apprendrait tiens... Qu'il s'attaque à des gens de sa force. Enfin, cela n'avait plus d'importance. On lui avait dit qu'un Lieutenant s'occuperait du rapport, et cela arrangeait bien l'Alchimiste. Pour l'heure, elle essayait surtout d'arriver à l'heure à son rendez-vous avec son supérieur. Oh elle aurait même pu arriver à l'avance si elle l'avait voulu, mais elle avait préféré faire un détour par l'extérieur de la ville, et ainsi profiter du paysage un peu, au cas où ce nouvel officier qu'on lui assignait se révélait être aussi ennuyant que le précédent. Enfin, apparemment il n'était que Lieutenant Colonel, la différence de grade était donc bien moindre, il ne devrait pas trop la saouler avec ça.
Quoi qu'il en soit, Amélie offrait maintenant au citoyen de la ville le fabuleux spectacle d'une militaire presque en retard pestant car elle allait arriver en retard pour se présenter. Bien sûr elle aurait pu courir, mais elle avait ses raisons de ne pas le faire... Quoi qu'il en soit, grâce à l'aide d'une voiture militaire qui passait sur son chemin, l'Alchimiste put arriver deux minutes à l'avance devant la porte de son futur supérieur. Etant couverte de poussière, elle profita de ce répit pour s'épousseter minutieusement, afin de ne pas paraître trop négligée. Elle s'approcha ensuite de la porte, et frappa légèrement, de peur de faire sursauter la personne qui était probablement en train d'étudier minutieusement son dossier. Lorsqu'on lui intima l'ordre d'entrer, Amélie s'éxécuta et pénétra dans le bureau, pour se mettre tout de suite au garde à vous et se présenter de la façon la plus conventionnelle et ennuyeuse qui soit.
"Major Reyes Moraga au rapport mon Colonel!"
Elle observa ensuite l'homme derrière son bureau. Contre toute attente, il semblait surpris de la voir, et au vu de la pile de dossiers sur son bureau, était probablement occupé à écrire l'un ou l'autre rapport. Mais l'homme lui indiqua presque immédiatement qu'elle avait le droit de se mettre au repos, ce qui soulagea le Major d'une certaine inquiétude.
*Au moins il ne va pas me forcer à rester au garde à vous durant tout les rapports que nous aurons, comme l'autre vieil imbécile...*
L'homme se leva ensuite, et s'approcha de la jeune femme, gardant un moment le silence. Puis prit un air beaucoup plus décontracté, voire même amical. Quelle surprise! Un officier qui n'était pas pompeux à souhait! Amélie se prit à croire que peut-être elle allait apprécier son nouveau supérieur, quand celui-ci prit la parole:
-Et bien comme vous devez sans doute être au courant je suis Frantz Hoper. Beaucoup m'appelle mon lieutenant mais personnellement je préfères largement que l'on m'appelle par mon prénom. D'ailleurs sa vous dérange pas que je vous appelle Amélie? Je dois vous avouer que j'ai pris connaissance de votre arrivé qu'au dernier moment, donc je n'ai pas vraiment préparer de discours. Si vous voulez je demanderais que l'on vienne vous installer un bureau ici. C'est pas très grand mais tu verras l'on si plait bien. J'allais m'apprêter à me plonger dans mes recherches mais là il semblerait plus pertinent que l'on discute un peu si à l'avenir nous devons travailler ensemble.
Voilà qui était inhabituel au possible! non seulement cet officier n'était pas pompeux, mais demandait même à l'Alchimiste de l'appeler par son prénom, ce qui en soit était très rare. De plus, il était presque immédiatement passé du vouvoiement au tutoiement, ce qui ne gênait pas le moins du monde la jeune femme. Cet homme paraissait honnête au premier abord, et lui avait clairement avoué ne pas s'être préparé à la recevoir. Il était évident qu'il ne cherchait pas à paraitre parfait, et ses paroles dénotaient une envie de se rapprocher de sa subordonnée.
*Après tout, ça me semble une bonne idée! Ce sera en tout cas toujours plus agréable que l'autre vieil abruti...*
Amélie offrit donc un merveilleux sourire à son supérieur, montrant qu'elle était contente d'être tombée sur quelqu'un comme lui (et surtout pas sur un autre vieux mégalo) et lui répondit:
"C'est avec plaisir que je m'installerai ici avec vous mon... Euh Frantz! Pour ce qui est de la discussion, qu'aimeriez vous savoir?"
Amélie avait ici pesé ses mots. Si elle avait franchement consenti à appeler son supérieur par son prénom, elle ne savait pas encore si elle pouvait elle aussi le tutoyer, ni si elle était en droit de lui poser des questions, aussi attendit-elle la suite de la conversation.